L’islam et les femmes
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L’islam et les femmes
Le professeur Madsen Pirie s’était donné la peine de traverser la Manche pour venir nous voir. Le professeur Millière, lui, a traversé l’Atlantique. Certes il habite en France la plus grande partie de l’année, mais il donne des cours dans plusieurs universités américaines pendant l’été, et il revenait juste de Californie lorsqu’il est venu au Cercle Frédéric Bastiat nous parler de l’Islam.
L’islam est à l’ordre du jour. Il nous apparaît sous des traits conquérants en Iran et en Algérie, sous des traits figés en Arabie Saoudite, sous des traits de victime en Bosnie. Quelle est sa nature profonde ?
L’islam est chronologiquement la troisième religion monothéiste. Apparu dans un contexte marchand, donc ouvert, il s’est singularisé par le discours totalisant, sans interstices, d’un prophète armé, Mahomet. Contrairement au christianisme, qui distinguait "ce qui est à Dieu et ce qui est à César", il ne distingue pas la foi, la morale, et l’organisation de la Cité. Le Coran, contrairement à la Bible, traite de tout. La notion de laïcité, acceptable chez les Juifs et les Chrétiens, est donc fondamentalement antinomique avec l’Islam.
L’Islam est aussi antinomique avec la démocratie, mécanisme qui permet aux pays occidentaux d’adapter ses lois à la lumière de l’expérience acquise. Prisonnières de leurs textes sacrés, les nations islamiques n’ont pas cette ressource. Lorsque les élites des pays musulmans veulent s’adapter aux modalités économiques modernes, comme les prêts à intérêt, ils sont obligés de faire des contorsions pour contourner la loi islamique sans en avoir l’air. Cela ne marche pas forcément. Lorsque Bourguiba a voulu permettre aux travailleurs de se nourrir à midi pendant le Ramadan, il a mis cela sur le compte de la "Djihad", la guerre sainte, en prétendant que c’était une mesure nécessaire au redressement de la patrie. Mais les Ulémas, les docteurs de la foi qui sont en terre d’Islam les gardiens de l’orthodoxie, n’ont rien voulu savoir, et Bourguiba a du faire marche arrière.
D’une manière plus générale, toute modernisation apparaît vite, dans un pays musulman, comme devant passer par une désislamisation qui sera considérée comme une trahison par les fidèles de la religion. C’est pourquoi les leaders qui se sont sentis assez fort pour le faire, comme Attaturk, ou Palhavi, le père du défunt Shah, se considérèrent obligés d’imposer la modernisation par la violence. Mais ces réformes sont fragiles car constamment menacées par les fondamentalistes. On a vu ce qu’il en est advenu en Iran. On ne peut donc pas dire qu’il existe une démarcation radicale entre islamisme et intégrisme. L’intégrisme ne fait jamais que s’appuyer sur des textes. Ce n’est pas une hérésie.
Faute de pouvoir se développer par des méthodes économiques modernes reposant sur le marché, les sociétés islamiques sont restées essentiellement féodales. Elles n’ont pu accroître leurs niveaux de vie que par les conquêtes ou les prédations. On peut classer dans cette dernière catégorie l’appropriation autoritaire, au mépris des contrats signés, des ressources appartenant aux compagnies pétrolières, ressources que ces compagnies avaient acquises et développées avec leurs capitaux et leur savoir faire.
La liberté d’interprétation des textes sacrés qui existe chez les chrétiens, et qui leur permet d’adapter leurs mœurs au progrès des connaissances et des libertés individuelles - même si c’est par l’intermédiaire du pape chez les catholiques, et même si ce processus est très lent - n’existe pratiquement pas chez les musulmans. Il n’existe d’ailleurs pas selon l’Islam de réalité observable indépendante de ce qu’a enseigné le prophète, et l’on peut noter que les sciences expérimentales n’ont pu se développer en terre d’Islam que sous les régimes assez forts et assez éclairés pour obtenir de facto une certaine séparation entre le clergé et l’État, donc pour parvenir à une relative désislamisation.
L’islam est-il au moins compatible avec les droits de l’homme, tels que nous les entendons ? Il ne cultive pas les valeurs de liberté et de responsabilité individuelles. Il accepte l’esclavage (comme d’ailleurs l’Ancien Testament), mais n’oblige pas à le pratiquer. L’esclavage a donc pu diminuer, sous la pression, entre autres, de l’O.N.U. En revanche il ne reconnaît pas les mêmes droits à la femme qu’à l’homme. Il autorise l’homme à avoir plusieurs femmes, qui sont sa propriété, et l’autorise à les battre s’il ne peut les convaincre autrement. En justice, le témoignage de la femme ne vaut que la moitié de celui de l’homme. Elle hérite moitié moins que ses frères.
Elle est soumise à différentes contraintes, telles que le port du voile, ou l’interdiction de pratiquer nombre d’activités ou de professions. Elle est soumise à des châtiments qui lui sont spécifiques, comme la lapidation.
Toutes ces discriminations sont inscrites dans le Coran, dans les Hadiths, équivalent des évangiles pour l’Islam, ou dans le Fikh - la loi tirée du Coran et des Hadith dont les docteurs de la foi sont les gardiens sourcilleux -, ce qui rend leur disparition fort problématique.
La discussion a confirmé la quasi-impossibilité de réforme des usages lorsque ceux-ci sont explicitement consignés dans les textes sacrés : dans les religions judéo-chrétiennes l’enseignement de Dieu se fait par témoins interposés, ce qui laisse place à l’exégèse, et permet de distinguer le contingent du permanent. Au contraire, le Coran est la parole de Dieu, dictée telle quelle à Mahomet. Dès lors que tout musulman est membre de la Umma, communauté des croyants, et en temps que tel soumis à la parole de Dieu, toute critique du Coran est prise comme une attaque personnelle par un musulman. Il se sentira le devoir de châtier le coupable, surtout si celui-ci est musulman, l’apostasie n’étant pas tolérée par l’Islam. Exemple : l’affaire Salman Rushdie.
La discussion a aussi porté sur l’acceptation apparent de leur état par nombre de femmes musulmanes. Guy Millière a répondu qu’il serait imprudent de se prononcer sur ce point dans la mesure où nous ne disposons pas de sondages sur ce que pensent réellement les femmes, et où l’on peut constater que lorsque les femmes s’expriment ouvertement, elles font l’objet de menaces ou de persécutions.
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* Le professeur Guy Millière enseigne le droit et l’économie de l’information à l’Université Paris VIII. Il fait aussi une série de conférences pendant l’été à l’Université de Californie, sur la civilisation française. Il a également enseigné à "Sciences-Po".
Guy Millière est titulaire d’un doctorat du troisième cycle en littérature, et d’un autre en sociologie culturelle. Il prépare un doctorat d’État en Philosophie. Il est également titulaire d’un master en économie de l’Université de Stanford. Véritable encyclopédie vivante en matière d’art, de littérature, d’histoire, de sociologie, et d’économie, il a publié de nombreux livres et articles. On lui doit la traduction de quelques uns des chefs d’oeuvre de la pensée économique américaine contemporaine. C’est un connaisseur éclairé des textes et de la civilisation islamique.
L’islam est à l’ordre du jour. Il nous apparaît sous des traits conquérants en Iran et en Algérie, sous des traits figés en Arabie Saoudite, sous des traits de victime en Bosnie. Quelle est sa nature profonde ?
L’islam est chronologiquement la troisième religion monothéiste. Apparu dans un contexte marchand, donc ouvert, il s’est singularisé par le discours totalisant, sans interstices, d’un prophète armé, Mahomet. Contrairement au christianisme, qui distinguait "ce qui est à Dieu et ce qui est à César", il ne distingue pas la foi, la morale, et l’organisation de la Cité. Le Coran, contrairement à la Bible, traite de tout. La notion de laïcité, acceptable chez les Juifs et les Chrétiens, est donc fondamentalement antinomique avec l’Islam.
L’Islam est aussi antinomique avec la démocratie, mécanisme qui permet aux pays occidentaux d’adapter ses lois à la lumière de l’expérience acquise. Prisonnières de leurs textes sacrés, les nations islamiques n’ont pas cette ressource. Lorsque les élites des pays musulmans veulent s’adapter aux modalités économiques modernes, comme les prêts à intérêt, ils sont obligés de faire des contorsions pour contourner la loi islamique sans en avoir l’air. Cela ne marche pas forcément. Lorsque Bourguiba a voulu permettre aux travailleurs de se nourrir à midi pendant le Ramadan, il a mis cela sur le compte de la "Djihad", la guerre sainte, en prétendant que c’était une mesure nécessaire au redressement de la patrie. Mais les Ulémas, les docteurs de la foi qui sont en terre d’Islam les gardiens de l’orthodoxie, n’ont rien voulu savoir, et Bourguiba a du faire marche arrière.
D’une manière plus générale, toute modernisation apparaît vite, dans un pays musulman, comme devant passer par une désislamisation qui sera considérée comme une trahison par les fidèles de la religion. C’est pourquoi les leaders qui se sont sentis assez fort pour le faire, comme Attaturk, ou Palhavi, le père du défunt Shah, se considérèrent obligés d’imposer la modernisation par la violence. Mais ces réformes sont fragiles car constamment menacées par les fondamentalistes. On a vu ce qu’il en est advenu en Iran. On ne peut donc pas dire qu’il existe une démarcation radicale entre islamisme et intégrisme. L’intégrisme ne fait jamais que s’appuyer sur des textes. Ce n’est pas une hérésie.
Faute de pouvoir se développer par des méthodes économiques modernes reposant sur le marché, les sociétés islamiques sont restées essentiellement féodales. Elles n’ont pu accroître leurs niveaux de vie que par les conquêtes ou les prédations. On peut classer dans cette dernière catégorie l’appropriation autoritaire, au mépris des contrats signés, des ressources appartenant aux compagnies pétrolières, ressources que ces compagnies avaient acquises et développées avec leurs capitaux et leur savoir faire.
La liberté d’interprétation des textes sacrés qui existe chez les chrétiens, et qui leur permet d’adapter leurs mœurs au progrès des connaissances et des libertés individuelles - même si c’est par l’intermédiaire du pape chez les catholiques, et même si ce processus est très lent - n’existe pratiquement pas chez les musulmans. Il n’existe d’ailleurs pas selon l’Islam de réalité observable indépendante de ce qu’a enseigné le prophète, et l’on peut noter que les sciences expérimentales n’ont pu se développer en terre d’Islam que sous les régimes assez forts et assez éclairés pour obtenir de facto une certaine séparation entre le clergé et l’État, donc pour parvenir à une relative désislamisation.
L’islam est-il au moins compatible avec les droits de l’homme, tels que nous les entendons ? Il ne cultive pas les valeurs de liberté et de responsabilité individuelles. Il accepte l’esclavage (comme d’ailleurs l’Ancien Testament), mais n’oblige pas à le pratiquer. L’esclavage a donc pu diminuer, sous la pression, entre autres, de l’O.N.U. En revanche il ne reconnaît pas les mêmes droits à la femme qu’à l’homme. Il autorise l’homme à avoir plusieurs femmes, qui sont sa propriété, et l’autorise à les battre s’il ne peut les convaincre autrement. En justice, le témoignage de la femme ne vaut que la moitié de celui de l’homme. Elle hérite moitié moins que ses frères.
Elle est soumise à différentes contraintes, telles que le port du voile, ou l’interdiction de pratiquer nombre d’activités ou de professions. Elle est soumise à des châtiments qui lui sont spécifiques, comme la lapidation.
Toutes ces discriminations sont inscrites dans le Coran, dans les Hadiths, équivalent des évangiles pour l’Islam, ou dans le Fikh - la loi tirée du Coran et des Hadith dont les docteurs de la foi sont les gardiens sourcilleux -, ce qui rend leur disparition fort problématique.
La discussion a confirmé la quasi-impossibilité de réforme des usages lorsque ceux-ci sont explicitement consignés dans les textes sacrés : dans les religions judéo-chrétiennes l’enseignement de Dieu se fait par témoins interposés, ce qui laisse place à l’exégèse, et permet de distinguer le contingent du permanent. Au contraire, le Coran est la parole de Dieu, dictée telle quelle à Mahomet. Dès lors que tout musulman est membre de la Umma, communauté des croyants, et en temps que tel soumis à la parole de Dieu, toute critique du Coran est prise comme une attaque personnelle par un musulman. Il se sentira le devoir de châtier le coupable, surtout si celui-ci est musulman, l’apostasie n’étant pas tolérée par l’Islam. Exemple : l’affaire Salman Rushdie.
La discussion a aussi porté sur l’acceptation apparent de leur état par nombre de femmes musulmanes. Guy Millière a répondu qu’il serait imprudent de se prononcer sur ce point dans la mesure où nous ne disposons pas de sondages sur ce que pensent réellement les femmes, et où l’on peut constater que lorsque les femmes s’expriment ouvertement, elles font l’objet de menaces ou de persécutions.
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* Le professeur Guy Millière enseigne le droit et l’économie de l’information à l’Université Paris VIII. Il fait aussi une série de conférences pendant l’été à l’Université de Californie, sur la civilisation française. Il a également enseigné à "Sciences-Po".
Guy Millière est titulaire d’un doctorat du troisième cycle en littérature, et d’un autre en sociologie culturelle. Il prépare un doctorat d’État en Philosophie. Il est également titulaire d’un master en économie de l’Université de Stanford. Véritable encyclopédie vivante en matière d’art, de littérature, d’histoire, de sociologie, et d’économie, il a publié de nombreux livres et articles. On lui doit la traduction de quelques uns des chefs d’oeuvre de la pensée économique américaine contemporaine. C’est un connaisseur éclairé des textes et de la civilisation islamique.
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